Si l’on excepte l’UBS et Nestlé, les entreprises forcées d’annoncer des bénéfices en milliards sont plutôt rares dans notre pays. Il en est une pourtant dont on parle peu, ou pas assez. Elle s’appelle Confédération. Avec une différence toutefois, que ses experts comptables n’ont pas suivi les mêmes cours de comptabilité. Là où les premiers prévoient des résultats relativement proches de ce qui est ensuite publié, Dame Confédération se plante largement. Années après années depuis 2007, la différence entre le prévu et le réalisé s’étend comme un voile sous la bise. Rien qu’en 2018, l’excédent ordinaire prévu à 300 millions atteint 2,9 milliards. Allez soyons généreux, parlons de 3 milliards, il y a bien quelque part un petit fonds de réserve.
Car la réserve, ça lui connait à Dame Confédération. Coucher sur un tas d’or ne lui cause pas d’état d’âme par rapport à ceux qui couchent sur le charbon. Cependant, il ne faut point attendre de reconnaissance de sa part, Zaehringen n’est plus de ce monde. Elle continuera de serrer les boulons sur chaque centime qui peut être amassé. Rien ne change au fil des siècles. Molière décrivait déjà cet état d’esprit dans l’Avare, et son truculent Harpagon, repris au cinéma par de Funès, n’aurait pas fait mieux. Il se serait également glorifié d’avoir réalisé une économie de 400 millions sur la prévoyance sociale… L’important étant de ne pas perdre le moindre écu. «Il ne pense qu’à sa cassette, qui contient dix mille écus d’or, et qu’il a enterrée dans le jardin. Il personnifie son argent, qui est la source de son bonheur», est-il décrit dans l’Avare. Gageons qu’Ueli Maurer a un sommeil profond, la cassette aux écus sur le cœur. Surtout sans cauchemarder s’il en manque un.