En 1907, Guillaume Apollinaire publiait «les Onze mille Verges», décrivant par le menu les amours pornographiques d’une obscénité morbide et déjantée d’un Hospodar en goguette. Difficile de décrire plus crûment des actes de chair d’une violence inouïe. Sauf peut-être en 1791, lorsqu’un aristocrate débauché du nom de Donatien Alphonse François de Sade, Marquis de son état, publiait sans état d’âme toute sa cruauté subversive dans «Justine ou les malheurs de la vertu». Et ça marchait. Ses livres on se les arrachait. Avec le défilé des siècles, et l’arrivée du romantisme, les mœurs se sont adoucies. Les récits s’édulcorent et l’on s’émeut encore un peu à la lecture d’histoire d’O. En 2005, Frédéric Mitterrand ne trouve aucun obstacle à publier chez Laffont «La mauvaise vie», une autobiographie dans laquelle, tous voiles tombés, il décrit le parfum et le goût des petits garçons qu’il s’offre à coup de dollars en Thaïlande. Aucune censure. Et les 50 nuances de Grey n’en connaîtront pas davantage en 2011 lors de la sortie du premier tome, ni des suivants. Nous vivions alors dans ce temps aujourd’hui écorné, entre 1881 date à laquelle tombait la censure, et me#too. Ce mouvement de bien-pensance œuvre pour l’épuration morale en matière de sexe, d’érotisme et de pornographie. Mais il va beaucoup plus loin encore puisqu’il crée des foyers d’endoctrinement qui influencent jusqu’aux éditeurs parisiens ayant pignon sur rue. L’un des premiers à en faire les frais, accusé sans qu’une preuve n’ait pu être apportée par un tribunal, est Woody Allen. Honte à Hachette qui se laisse impressionner jusqu’à refuser de publier ses mémoires (peut-être même pas lues) sur une rumeur d’attouchements sur une enfant. Il était en plein divorce dans un show business où tous les coups sont permis. A quand la censure de la bêtise?